Le renouveau et ses trentenaires
Ce 6 novembre 2012, le Cameroun célèbre la fête du renouveau. En effet il s’agit de la célébration des 30 ans de pouvoir du président Paul Biya. C’est le 6 novembre 1982 qu’il a accédé à la magistrature suprême. Une date dont seuls les cinquantenaires d’aujourd’hui peuvent avoir réellement souvenance. Parce que plusieurs jeunes de mon âge n’en savent réellement rien, et ne se réfèrent qu’à ce qui est dit dans les médias. Et çà c’est pour ceux qui malgré tout veulent encore en savoir quelque chose sur la politique de leur pays. C’est un secret de polichinelle que de dire que beaucoup de jeunes, les trentenaires comme le renouveau, se fichent pas mal de la politique de leur pays le Cameroun. Va donc comprendre pourquoi ! En ce jour, sans être spécialiste de quelque politique que ce soit, je me permets de dresser quelques clichés des jeunes trentenaires comme moi.
Le jeune trentenaire d’aujourd’hui est celui qui chauffe les bancs des amphis à l’Université de Yaoundé I, ou des autres sept Universités d’Etat à travers le pays. Son esprit est vague entre le système LMD (Licence-master-Doctorat) bêtement copié de l’occident il y a cinq ans et dont ni lui, ni ses enseignants n’en savent pas grand-chose, et l’espoir d’un boulot.
Le jeune trentenaire d’aujourd’hui est ce jeune vendeur à la sauvette au marché Mokolo à Yaoundé. Après ses brillantes études durement payées par des parents qui eux-mêmes avaient du mal à joindre les deux bouts suite à la récession économique qui a conduit à la réduction de moitié des salaires des fonctionnaires dans les années 90, il s’est retrouvé contraint à se débrouiller comme il peut, dans la rue, à vendre des haillons.
Le jeune trentenaire d’aujourd’hui est celui là qui n’a qu’un seul rêve : aller en Europe, au front ! Par la route, à travers les pays d’Afrique de l’Ouest et le désert du Sahara et par la nage s’il le faut. Les multiples campagnes d’information sur les dangers de cette aventure, il n’en a cure. L’eldorado c’est au pays des blancs. « Il vaut mieux souffrir au front que de souffrir dans son propre pays ».
Le jeune trentenaire d’aujourd’hui est cet élève de l’Ecole Normale, de l’Ecole de Magistrature ou de l’Ecole des Relations Internationales. Il sourit chaque jour en arborant sa vieille veste blanchie aux épaules car le « bout du tunnel » est proche. Une seule idée l’anime chaque jour : se faire beaucoup d’argent pendant ses cinq premières années de service. De quoi rembourser les deux ou trois millions empruntés dans une tontine par ses parents et qui ont servis à lui acheter sa place dans cette prestigieuse école.
Le jeune trentenaire d’aujourd’hui est celui là qui n’a pour seul capital que sa santé. Grace à elle, il peut se livrer à tout genre d’activités pour gagner sa pitance : Manœuvre, pousseur etc.
Le jeune trentenaire d’aujourd’hui est ce jeune qui arpente chaque jour l’Avenue Kennedy à Yaoundé. C’est un « Apacheur ». Il joue les commerciaux pour des boutiques de luxe et accoste tous ceux qu’il juge potentiel client. Il vous guide vers l’une de ces boutiques et touche des commissions sur le montant de vos achats. Il se transforme très souvent en « Awacheur », un pic-poket. Et dans ce rôle où il excelle par instinct de survie, tout y passe : porte monnaie, téléphone, bijoux… objet souvent revendus tellement vite que les prochains clients sont parfois propriétaire.
Le jeune trentenaire d’aujourd’hui est cette jeune fille qui arpente les trottoirs des coins chauds de la ville chaque soir à la recherche d’un client. Hum ! Je ne veux pas m’étendre sur mes copines là. Je risque de m’attirer les foudres de leurs multiples associations. Je veux seulement dire qu’elles aussi font parti des jeunes trentenaires qui ont tout perdu : plus d’espoir, pas de mari, pas de boulot…
A côté de cette liste de jeunes visiblement à la déroute qui ne ressentent pas les « grandes réalisations » dans leur vie, il y a une tranche qui est à l’abri du soleil. Par leur travail, leur abnégation et leur dévotion appuyés d’un coup du destin. Car il en faut pour sortir de l’impasse. C’est le Renouveau !
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